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DE L'ART SI JE VEUX De la peinture à la programmation : flying puppet Autodidacte, Nicolas Clauss découvre la peinture, puis voyage, de lInde vers lAustralie, se fixe en Corée du Sud. De retour en France il constate quelle se vend bien quand elle est de qualité. Trente toiles vendues à ses débuts, coup dessai, coup de maître. Une galerie quil juge une « bonne » galerie, la galerie Arnoult rue Guénegaud. Et pourtant, « Est-ce quon peut toujours faire de la peinture en 2000 ?». Une interrogation qui va le mener en 1999-2000, encore en autodidacte, à apprendre la programmation sur Director (Macromedia). Aujourdhui il fait partie des artistes qui ont appris à maîtriser loutil, à en éclairer et en élargir lusage ensuite, - le propre de lartiste. Le site flying puppet devient une référence. Nicolas Clauss y invite des contributeurs, figures représentatives de lart numérique : « Jean-Jacques Birgé, compositeur et cinéaste collabore régulièrement au site pour la musique et la conception de nombreux tableaux. Se joignent plus ponctuellement au site des amis, compositeurs de musique, programmeurs d'algorithmes, auteurs qui l'enrichissent de leurs collaborations : François Baxas, Frédéric Durieu, Thomas Le Saulnier, Antoine Schmitt, Bernard Vitet, Denis Colin, Patricia Dallio, Hervé Zenouda, Stéphane Copin et d'autres à venir. » Son travail a été récompensé par une douzaine de prix internationaux (Ars Electronica, Cyber@rt, Videoformes, Flash Festival, SACD, Villette Numérique...). Jai10ans.com Nicolas Clauss développe de plus un talent particulier : il fait le pari dintéresser à lart des jeunes que rien ne prédispose à approfondir le sujet. Jeunes des cités, quil accompagne dans une démarche de découverte : découverte de formes dexpression, celle des autres, celles deux-mêmes, et sans doute leur donne-t-il à jamais le goût des choses de la culture, capital pour la vie, bien précieux constitutif de lidentité. Le site http://www.jai10ans.com/ est exemplaire : une remise en scène de limage. Limage ici nest pas sauvage, abandonnée à elle-même, au motif que lanimation et lattrait du Web sauraient suffire : elle est au contraire très cadrée et encadrée, au sens le plus classique du terme. L image de Jeremy, de taille réduite, bordurée de flou, soulignée au crayon, incrustée dans un effet de transparence, nous propose une lecture plastique de lécran, là où il ny aurait eu que banalité de lautoportrait. Ailleurs le dessin denfant de Vincent est envahi de marionnettes volantes, des « flying puppet » parmi lesquelles le jeune dessinateur prend un envol magique à la Peter Pan. De lart si je veux Une résidence de plusieurs mois à lESPAL au Mans lui permet daller encore plus loin et de développer cette façon personnelle d « embarquer » les jeunes dans une uvre numérique quil élabore avec eux au fil des jours, sans compter les heures, parfois le dimanche, grâce au dévouement du personnel de cet Espace Culture Multimédia. « On sest mis daccord sur un thème : lart. Lidée du projet était de partir dun public candide qui ne connaît absolument rien en art contemporain et cest de passer plusieurs mois pour restituer le travail réalisé. Le pari : faire une uvre dart avec ça. Cest très ambitieux ».La forme que prend loeuvre lest aussi : outre un site Internet, une installation « lourde » qui va tourner dans plusieurs villes de France. Elle a été montrée au Mans, projetée sur le sol. « Beaucoup de programmation, beaucoup de code, toujours une recherche formelle, inventer des nouveaux trucs ». Cest précisément cette invention formelle quon retient dabord : la beauté plastique alliée au « numérique » (son, image, texte, mouvement). A chaque fois les jeunes commentent les peintres en vivant lexpérience esthétique et en simpliquant, en sy incorporant, au sens propre du terme : Bacon, Basquiat, Duchamp, Spoerri sont revisités. Ils se filment, sincrustent dans la toile ou la sculpture, sy imbriquent, la commentent, la vivent, en somme. « Quand on comprend, lart, on trouve que ça a un sens ». « Lart cest croire en son projet ». «Lart permet de se faire écouter, de se faire entendre, de se faire comprendre ». Un des jeunes, quand il sagit de commenter Spoerri, va trouver son père cuisinier avec lequel il a un entretien. Un autre anime un triptyque dans lesprit de Basquiat. Pour Arman, cest une accumulation de corps en mouvement dans une mécanique gestuelle qui évoque luvre de lartiste numérique Du Zhenjun. « Le numérique, oui, mais pas seulement. » Tout a commencé cependant par
la lecture : des gros livres sur lart contemporain empruntés
à la médiathèque où ils ont pu déterminer
leurs choix. Sur Jean-Michel Basquiat, tous étaient daccord.
Marcel Duchamp a suscité des commentaires inspirés. «
Le numérique, oui, mais pas seulement
» dit Nicolas
Clauss. Cest sans doute la démarche globale de lartiste
quil faut saluer, maîtrise des outils, recherche formelle,
recherche documentaire avec les adolescents sans doute plus rigoureuse
quil ny paraît. Un projet très cadré techniquement
et esthétiquement. En mai 2005 : Janique LAUDOUAR |