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Le Courrier de Mantes, 16 avril 2003

Six artistes français à la pointe du Net-art

A Toronto, New York, Rio et Berlin, on considère qu’en matière de Net-art, c’est à Paris que les choses se passent en ce moment. Quatre structures préoccupées d’art numérique signalent l’apparition d’une “Paris Connection”, et lui consacrent un site en forme de manifeste, dont quatre répliques existent, hébergées par coriolisweb.org (Toronto), turbulence.org (New York), arteonline.arq.br (Rio) et dichtung-digital.org (Berlin).

Parmi les six artistes qui ont été enrôlés dans cette avant-garde figure Nicolas Clauss, 34 ans, en résidence l’année dernière à l’Espace culture multimédia (ECM) des Mureaux (1). Son travail aux Mureaux est devenu un site, cinq-ailleurs.com, et un CD-rom (lire l'article du 31 juillet 2002).

A l’origine du projet “Paris Connection”, on trouve un Canadien, Jim Andrews, lui-même artiste multimédia, pressé de faire connaître “l’extraordinaire web art pratiqué à Paris par six artistes français”.

Les six artistes se connaissent, collaborent aux travaux des uns et des autres. Cinq d’entre eux utilisent le logiciel Director de Macromedia. Le groupe, relativement informel, s’organise autour de Jean-Jacques Birgé, qui passe pour être “le” musicien multimédia en France.

“Une des choses intéressantes à propos du groupe (...) dont nous parlons, est l’étendue de ces artistes dans le champ des arts, des médias mais aussi de la programmation et des mathématiques. Et pas seulement l’étendue mais aussi l’intensité de chacun d’entre eux”. Un tel enthousiasme donne envie de voir les œuvres en question. Elles sont en ligne. En effet, “le serveur est pour les artistes web et de nombreux autres artistes numériques ce que la galerie d’art est aux artistes visuels. (...) Et, comme il s’agit vraiment d’artistes du web, ce que vous trouverez en ligne est l’oeuvre elle-même, non sa représentation”. (Andrews)

Andrews considère que l’apport spécifique de Nicolas Clauss se situe “à l’intersection du cinéma expérimental, de la peinture et de l’interactivité” (cité par Libération).

“Dans les programmes que j’ai vus de lui, son lingo {langage de programmation} est entièrement contenu dans le script d’image. Entendez que l’action et l’interactivité sont entièrement contrôlées par un script, le script du marionnettiste, d’une certaine manière. Plutôt que de créer des objets plus ou moins indépendants avec leur propres comportements, les travaux de Clauss sont des travaux à “script unique” dans lesquels les différents médias sont subordonnés au comportement global de la pièce”.

Les créations de “Paris Connection” suscitent les discours les plus savants. Une exégète brésilienne, Regina Célia Pinto, convoque même Claude Lévi-Strauss.

La vision d’une création comme Dervish Flowers, sur le site de Nicolas Clauss flyingpuppet.com, rend moins abstrait le discours d’Andrews. Soit une rose et un air de guitare nostalgique qui s’arpège au passage de la souris. Un clic fait exploser la fleur en une nuée de derviches tourneurs que l’on perd, l’un après l’autre, dans les bords du cadre. Il y a maintenant deux roses, et encore plus de pétales-derviches... Un “objet Shockwave” interactif et poétique, totalement singulier, fait de boucles (musicales, informatiques) et de transparences subtiles, et qui ne semble pas devoir connaître de fin. Un vrai travail de peintre, aussi. Ceux qui sont familiers avec les œuvres de Nicolas Clauss verront comment il recycle une image, une vieille photo de noce déjà aperçue dans l’installation faite en 1998 au manoir d’Herbevillle, dans les Yvelines.

Le site “Paris Connection” clame la nouveauté absolue des travaux de Clauss et des autres, réunies sous la bannière d’une “poésie algorithmique”. Cette nouveauté, on s’en faisait déjà une idée en 2002 quand Nicolas Clauss travaillait à l’ECM des Mureaux.

Claude Cécile


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